Les nouveaux challenges de la prise de parole dans les médias

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Pour sa quatrième édition, On Ne Parle Pas La Bouche Pleine a voulu faire le point sur les tendances médias, histoire de vérifier en quoi la prise de parole était impactée par les évolutions en matière de consommation et de fabrication de l’information. Pas de synthèse ici, mais quelques focus totalement arbitraires. Et vous, vous en dites quoi ?

  • La presse ne va pas fort (en même temps, elle n’a pas attendu Internet). Sa santé est étroitement conditionnée à ses rentrées publicitaires. Le truc, c’est que Google et Facebook sont en capacité comme nul autre de répondre à la demande exponentielle de précision de ciblage des consommateurs. A eux deux, ils captent déjà les deux tiers des revenus publicitaires.
  • La fonction même du journaliste est modifiée. Il contribue moins à la fabrication d’un journal (un RDV avec l’actualité à un instant t) qu’à l’alimentation d’un flux d’information. Ca n’a l’air de rien mais ça n’est pas du tout pareil. La fonction sociale du journaliste (sélectionner les infos, clarifier les événements, mettre en perspective, former l’esprit critique…) se transforme progressivement en fonction économique (produire de la quantité).
  • On traine depuis quelques années une sérieuse contradiction en France (une seule ?) : on consomme l’info de préférence sur les réseaux sociaux (de plus en plus), puis en télé, puis à la radio et enfin, en presse écrite alors qu’on a d’abord confiance dans les infos à la radio, puis en presse écrite, puis en télé et de moins en moins dans les réseaux sociaux. Cherchez l’erreur.
  • L’âge moyen du téléspectateur est de 52 ans (ah quand même !). L’enjeu pour les chaines n’est probablement pas de rajeunir leur audience mais plutôt de faire du petit écran un lieu qui rassemble, le lieu des grands événements – Et c’est vrai que le foot, la campagne présidentielle, comme la couverture des attentats nous ont rassemblé devant la télé. Côté info, j’ajoute qu’en ces temps sombres d’infox, voir la personne qui remet l’information, ça rassure.
  • Il y a une question qui fait débat, est-ce que Google ou Facebook sont des « organes de presse » ? On peut dire non, si on considère que personne n’y écrit / n’y produit l’info. On peut dire oui, si on considère la responsabilité des deux plateformes dans la sélection de l’information (cf point 2). Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais sachez que Reuters Institute a étudié la consommation de l’information dans 36 pays. A la question, préférez-vous des informations sélectionnées par une rédaction ou par un algorithme ? La réponse est … algorithme (54%).
  • Parmi les tendances à observer, il y a le journalisme d’investigation qui se réinvente autour de consortiums mondiaux, et peut être demain de consortiums locaux. On peut aussi s’intéresser aux retours des « RDV » avec l’actualité pour rompre avec le flux permanent d’informations ou surveiller l’évolution de l’infotainement, au sujet de laquelle Acrimed* s’interroge « Peut-on se satisfaire d’un divertissement stéréotypé, qui prétend être politiquement incorrect, moderne et cool alors qu’il est en fait toujours consensuel, sympa et pas subversif ? »

Allez, je m’arrête là. Avec trois conclusions sur la prise de parole :

  1. Pour émerger, il faut être prêt à rebondir (sur d’autres actus) et à polémiquer (défendre un parti-pris suppose suppose de renoncer au consensus)
  2. Toute prise de parole dans la presse est un coup à plusieurs bandes : on ne cherche plus l’audience (elle est partiellement partie), on cherche la caution des influencers (qui feront le job de l’audience sur les réseaux sociaux notamment)
  3. Il faut beaucoup de contenus et autant d’angles différents, à la fois pour occuper le terrain régulièrement ET pour exister sur des canaux démultipliés.

Voilà, y’a plus qu’à.

 

Références

 

Par Cecilia Vendramini

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Cecilia Vendramini

Cecilia Vendramini, Ma Parole, est consultante, formatrice et enseignante. Elle intervient sur le management de la prise de parole, les communications délicates (com de crise, conduite du changement), l’éthique et la communication. Cecilia bénéficie d'un long parcours en relations publics et communication, plutôt - mais pas seulement - orienté grands comptes.

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